Invités :
- Général Dominique Trinquand, ancien chef de la mission militaire française auprès de l’ONU
- Marc Hecker, chercheur à l’Ifri, spécialiste des questions de défense et de terrorisme
- Marie-Cécile Naves, directrice de recherche à l’IRIS
- Olivier Weber, grand reporter et auteur de « Massoud, le rebelle assassiné »
L’armée américaine a quitté l’Afghanistan le mardi 31 août dans la nuit, avec 24 heures d’avance. C’est la plus longue guerre menée par les États-Unis. Ce retrait ainsi que le marasme laissé à Kaboul marquent-ils l’échec de l’Occident ? Dans la matinée, les talibans se sont réjouis d’une « victoire historique ».« Sur le long terme, l’imposition de la démocratie en Afghanistan n’a pas fonctionné et parce que le retrait s’est passé de façon catastrophique. Il n’y a eu aucune anticipation et une manœuvre mal montée », estime le Général Dominique Trinquand.
Les observateurs déplorent la rapidité de la prise de pouvoir pour les talibans. « Les talibans sont rentrés dans la ville alors que les troupes occidentales, un certain nombre de civils et tous les afghans qui travaillaient pour les américains et les européens étaient encore présents. Cela a donné cette situation extrêmement chaotique », analyse Marc Hecker. « C’est un échec magistral », renchérit-il.
Du côté des médias américains, l’heure est plutôt au soulagement. « Les grandes guerres d’Irak et d’Afghanistan sont devenues au fil des années extrêmement impopulaires », analyse Marie-Cécile Naves. « Le coût humain, psychologique et financier est énorme. Beaucoup d‘américains y ont perdu des proches. Cela faisait longtemps que la population américaine souhaitait le départ de l’armée d’Afghanistan et d’Irak ». Ce retrait aura donc des conséquences limitées sur le plan politique. « Joe Biden ne perdra pas de crédit auprès de l’opinion publique américaine. On verra sur le long terme, notamment aux élections de mi-mandat l’année prochaine mais, malgré le chaos, l’opinion américaine lui en serait plutôt gré », estime Marie-Cécile Naves.
Les États-Unis ne sont plus les gendarmes du monde
Les bilans en Afghanistan et en Irak soulignent aussi l’impossibilité de mettre en place une gouvernance légitime par le biais d’une action militaire dans un pays. C’est également le constat que les États-Unis ne sont plus les gendarmes du monde. « C’est une évidence », affirme le Général Dominique Trinquand. « Les militaires ne sont qu’une petite réponse à ce sujet. Nécessaire, mais au bout du compte c’est une stratégie complète qu’il faut développer avec l’aide des pays », ajoute-t-il. « On ne résout pas les problèmes politiques par l’armée », précise Marie-Cécile Naves.