Invités :
Elsa Vidal, rédactrice en chef de la rédaction en langue russe de RFI
Pascal Boniface, directeur de l’Institut des Relation internationales et stratégiques (IRIS)
François Beaudonnet, rédacteur en chef de la rédaction européenne de France Télévisions
Plusieurs centaines de civils ont été retrouvés morts à Boutcha, une ville du nord-ouest de Kiev, suite au retrait des troupes russes. Les journalistes présents sur place rapportent des témoignages horrifiants sur les exactions commises par les soldats russes : assassinats, pillage, viols en réunion… S’agit-il de l’indicible réalité de la guerre ou bien d’une violence propre à l’armée russe ? « Le niveau de violence de l’armée russe est incomparable avec ce que l’on connaît dans une armée française où le droit de la guerre est enseigné. Dans la doctrine militaire russe, il n’y a pas de conception humanitaire et une grande violence s’exerce au sein de l’armée, explique Elsa Vidal. Ce que l’on voit, c’est aussi le résultat d’une politique de retrait, avec des soldats qui viennent des couches les plus basses de la population, qui ont eu une formation minimale et qui sont habitués à une certaine forme de violence. Ils ont probablement dû être laissés sans instruction. Au fur et à mesure que l’on découvrira d’autres cas éventuels, on pourra tirer des conclusions s’il y avait ou non une intention politique derrière ces crimes ».
La découverte de ces cadavres a suscité l’indignation internationale et européenne, ce qui complique fortement les médiations françaises à l’égard de Moscou. « Malgré le grand nombre d’appels depuis le début de cette guerre, la Russie va toujours plus loin », explique François Beaudonnet. En plus des nombreux témoignages et enquêtes internationales, les images satellites pourraient aussi la responsabilité de l'armée russe. « Cela semble bien montrer que ce ne sont pas des exactions isolées de soldats qui auraient trop bu, mais bien quelque chose de prévu et ordonné », précise-t-il.
En Russie, certains groupes au sein de la population, bien qu’encore minoritaires, essayent de debunker la propagande du Kremlin. Au sein de l’armée, le moral des militaires est en berne. « Pour ces soldats, rien de ce qu’on leur a dit ne se réalise. Ils sont pris au piège. Dans leur chair, ils voient la limite de la propagande », explique Pascal Boniface. Si aucune opposition ne se manifeste au sein des États Majors russes, certaines dissensions commencent à naître.