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EUROPE : LA COMMISSION, ENFIN !


​Après un parcours semé d’embûches, le 27 novembre, le Parlement de Strasbourg a donné son aval au collège de 26 membres présenté par Ursula vonder Leyen avec la plus large majorité enregistrée jusqu’à présent : 461 voix pour, 157 contre et 89 abstentions. Avec un mois de retard sur le calendrier, l’ancienne ministre allemande de la Défense devient aujourd’hui, la première femme présidente de la Commission européenne. Un retard dû au profil contestéde commissaires désignés, aux atermoiements du Brexit, à la polémique autour du nom d’un portefeuille devenu « Promotion du mode de vie européen » au lieu de « Protection » de ce mode de vie, aux équilibres fragiles du Parlement européen où pour la première fois depuis sa création en 1979, le Parti populaire européen (PPE) et celui des Socialistes et démocrates (SD) ne réunissent pas une majorité absolue et doivent composer avec Renew, constitué en juin 2019 et auquel La République en Marche est affilé, et enfin en raison de la dégradationdes relations entre Paris et Berlin.

​La France et l’Allemagne ont en effet eu bien du mal à se mettre d’accord sur le nom d’Ursula von der Leyen en tant que présidente de la Commission européenne. Ni Michel Barnier, ni Manfred Weber n’ont été choisis. Paris a consenti à accepter une allemande à condition de décrocher un portefeuille économique large. Entre-temps, Berlin a profité de la polémique sur la nomination de Sylvie Goulard pour contester via le Parti populaire européen lepérimètre de son portefeuille jugé trop large. Au terme de son audition au Parlement européen, le 14 novembre, le Français Thierry Breton a hérité de ce poste qui englobe le marché intérieur, la politique industrielle, le marché unique numérique, ainsi que l’industrie de la défense et de l’espace.

​Depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à l’Elysée en 2017, les différends se sont accumulés entre Paris et Berlin. Fin octobre, le coup d’éclat du Président français qualifiant l’Otan d’institution en état de « mort cérébrale » avait été jugé inacceptable par la chancelière allemande. Auparavant, en août, le « virage russe », du chef de l’Etat a d’autant plus irrité l’Allemagne qu’il a été opéré sans concertation avec la chancellerie. Mais la décision française la plus préjudiciable, serait d’avoir fermé la porte, en octobre, à un élargissement de l’Union européenne à l’Albanie et la Macédoine du Nord. La mésentente concerne également les programmes communs d’armement, la réforme de la zone euro et l’avenir de l’Europe de la Défense. Finalement, ce que le président français reproche surtout à la chancelière allemande, c’est de ne pas avoir répondu à ses propositions de 2017. De ne pas avoir saisi la main tendue.


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TREMBLEMENT DE PEUPLE EN IRAN

 

​En Iran, le 15 novembre, des manifestations ont éclaté dans une centaine de villes à l’annonce d’une hausse d’au moins 50% du prix des carburants à la pompe et malgré une réforme du mode de subvention de l’essence, censée bénéficier aux ménages les plus défavorisés. Le lendemain, sur ordre du Conseil suprême de sécurité nationale iranien l’accès à internet a été bloqué, pour n’être rétabli qu’une semaine plus tard. Durant cette période, une répression à huis clos s’est abattue sur le pays.

    Les manifestants s’en sont pris aux bâtiments officiels, symboles de la corruption du régime, y compris les écoles religieuses, les municipalités et les banques publiques. Des stations-service ont été incendiées, des commissariats de police attaqués et des magasins vandalisés. Les forces de sécurité ont fait usage d’armes à feu. Amnesty International évoque un bilan de plus de 150 morts vérifiées. Plus d’un millier de personnes auraient été arrêtées. « La rapidité avec laquelle le régime a réagi d’une main de fer indique qu’il se sent assiégé, et ne tolérera aucune dissidence », estime Ali Vaez, directeur du programme Iran à l’International Crisis Group. Pour un sociologue qui préfère demeurer anonyme, « cette violence est sans doute le résultat de l’accumulation de frustrations à la fois politiques et économiques ».

​Depuis le retrait unilatéral de Washington, en mai 2018, de l’accord sur le nucléaire iranien, les recettes du pays assurées à 40% par le pétrole ont chutédrastiquement. Selon le Fonds monétaire international, le produit intérieur brut de l’Iran, qui a chuté de 5% en 2018, devrait cette année baisser encore de 9,5%. La pénurie des biens de consommation entraîne une inflation qui atteint officiellement 40% et le taux de chômage des jeunes se situe autour de 30%. 

​En outre, pour la première fois, l’influence iranienne dans le monde arabeest contestée. A Beyrouth et dans le reste du Liban, un mouvement populaire remet en cause depuis la mi-octobre le système confessionnel qui profite au Hezbollah, la puissante formation politique et militaire chiite, relais des intérêts de l’Iran dans le pays. Plus encore, à Bagdad et dans le sud chiite de l’Irak, des milliers de manifestants, depuis fin octobre, refusent la mainmise de Téhéran sur leur pays. A quelques mois des législatives de février, la République islamique est affaiblie à l’intérieur par les sanctions américaines et dénoncée à l’extérieur pour son ingérence dans son environnement proche, au premier chef en Irak.


Chaque semaine, Philippe Meyer anime une conversation d’analyse politique, argumentée et courtoise, sur des thèmes nationaux et internationaux liés à l’actualité. Pour en savoir plus : www.lenouvelespritpublic.fr