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Gilets jaunes : vers une sortie de crise ? 

Hier, samedi 12 janvier, 84.000 manifestants ont participé à l’acte IX des Gilets Jaunes. Cela aura été l’occasion de constater que, depuis le 19 novembre, le théâtre des opérations de ce mouvement ne cesse de se démultiplier et de se déplacer. Certaines villes comme Bordeaux et Toulouse sont des foyers importants et constants de manifestations : au moins 5.000 participants aux défilés organisés hier dans ces deux villes. A peine moins qu’à Paris où les manifestants étaient 8.000 (dont 74 ont été placés en garde à vue). A l’appel de certains figures « historiques » du mouvement, 6.000 personnes se sont rassemblées à Bourges, ce qui place de cette ville juste après la capitale pour le nombre de manifestants. 

A Bourges et ailleurs, des leaders émergent ou ont émergé ces dernières semaines. Certains d’entre eux faisaient partie des huit porte-parole désignés par les militants fin novembre. D’autres annoncent des initiatives en rapport avec les élections européennes à venir, voire la création d’un mouvement politique. On voit apparaître ici et là les prémices d’une organisation et certains groupes de gilets jaunes ont accepté de déclarer leur manifestation en préfecture pour éviter les débordements des précédents samedis. L’une des réclamations les plus répandues avec le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune est la création d’un referendum d’initiative citoyenne dont les modalités et la portée ont autant de définitions qu’il a de partisans. Les demandes d’augmentation du pouvoir d’achat et de baisse de certaines taxes sont constantes, mais beaucoup des revendications dont on a connaissance sont saugrenues ou inconséquentes, tandis que d’autres paraissent manipulées par des lobbies ou des groupes politiques. Et, tandis que le Rassemblement national et la France insoumise affirment qu’il existe des liens de parenté entre eux et les gilets jaunes, le gouvernement n’a pas d’interlocuteur patenté à la veille du lancement du grand débat national dont l’organisatrice, Chantal Jouanno, vient de lui faire faux-bond après que la publication de son salaire a suscité une vive agitation sur les réseaux sociaux et au-delà.

Emmanuel Macron tente d’apaiser les tensions en se rendant personnellement au contact des Français comme il s’apprête à le faire dans l’Eure mardi prochain. Le chef de l’État adressera également aux Français en début de semaine prochaine la lettre qu’il avait promise lors de ses vœux. 


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2019 : annus horibilis pour l’Europe ?

Depuis le 1er janvier, la Roumanie exerce la présidence du Conseil de l’Union européenne pour une durée de six mois. Le pays est agité par le projet d’une réforme judiciaire qui permettrait notamment de gracier des individus accusés de corruption. Cette réforme est proposée par Liviu Dragnea, actuellement à la tête du parti social-démocrate roumain lui-même accusé de détournements massifs de fonds européens. La Roumanie n’est pas le seul pays de l’Union à faire aujourd’hui fi des règles démocratiques européennes. La Hongrie et la Pologne ont multiplié ces dernières années les atteintes à l’indépendance du pouvoir judiciaire et s’en sont pris aux organes anti-corruption. 

Toutefois, depuis quelques mois, ces gouvernements sont défiés par leur propre opinion publique. Ainsi la Hongrie connait-elle un fort mouvement hostile à la réforme du temps de travail instaurée par le gouvernement de Viktor Orban à la mi-décembre.

Les courants anti-européens ou populistes sont vivaces au sud de l’Europe. Aux élections régionales de décembre,    la deuxième plus grande et plus peuplée des 17 communautés autonomes d’Espagne, l’Andalousie a mis fin à 36 ans de pouvoir socialiste grâce au soutien du parti d’extrême droite, Vox, qui a remporté 12 sièges. Quant à l’Italie, après avoir affiché son soutien aux gilets jaunes la semaine dernière, son ministre de l’Intérieur Matteo Salvini cherche à forger des alliances entre extrême droite et droite dure en vue des élections européennes. En témoigne son récent déplacement à Varsovie le 9 janvier dernier pour y rencontrer les dirigeants du parti ultraconservateur Droit et Justice actuellement au pouvoir en Pologne. 

C’est dans ce contexte que l’Union européenne va devoir affronter en cette année 2019 un agenda chargé auquel figure le Brexit dont la date est fixée au 29 mars prochain si les négociations entre Theresa May et le Parlement britannique aboutissent ainsi que les élections européennes qui se tiendront les 23 et 26 mai prochain dans les 27 états membres et à l’issu desquelles 705 députés seront élus.

Chaque semaine, Philippe Meyer anime une conversation d’analyse politique, argumentée et courtoise, sur des thèmes nationaux et internationaux liés à l’actualité. Pour en savoir plus : www.lenouvelespritpublic.fr