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Une émission de Philippe Meyer, enregistrée au studio l’Arrière-boutique le 29 avril 2022.


Avec cette semaine :

  • François Bougon, journaliste spécialiste de la Chine, auteur de Dans la tête de Xi Jinping.
  • Nicolas Baverez, essayiste et avocat.
  • Lucile Schmid, membre du comité de rédaction de la revue Esprit


François Bougon, vous êtes journaliste et spécialiste de la Chine, vous avez été correspondant de l’AFP à Pékin entre 2005 et 2010 et vous êtes désormais responsable du service international de Mediapart. Vous avez publié en 2017 Dans la tête de Xi Jinping, aux éditions Solin et Actes Sud. Dans ce livre, vous ambitionnez de dresser un panorama des influences intellectuelles du président chinois et vous expliquez l’idéologie et la vision de l’histoire sur lesquelles s’appuie celui qui est devenu secrétaire général du Parti Communiste Chinois (PCC) en 2012 puis président de la République populaire de Chine en 2013.

Xi Jinping a des sources d’inspiration variées qui englobent l’ensemble de la tradition chinoise. Il ne rejette pas l’héritage maoïste en dépit du rapport ambivalent de sa famille avec le Grand Timonier et sa politique. Le père de Xi Jinping a combattu aux côtés de Mao avant d’être exclu du Parti en 1962, et Xi Jinping lui-même a fait partie des cohortes de « jeunes instruits » envoyés à la campagne pendant la Révolution culturelle pour y être rééduqué par les paysans. Vous expliquez, François Bougon, que le président chinois n’en a pas moins conscience du rôle fondateur de Mao dans l’histoire de la République populaire de Chine et qu’il estime que toute critique à l’égard du Grand Timonier risque d’affaiblir le régime.

Le président chinois se distingue de ses prédécesseurs en accordant une place importante dans sa pensée à l’histoire longue de la Chine. Là où les dirigeants communistes insistaient sur la rupture qu’a représentée la révolution de 1949, Xi Jinping exalte une civilisation chinoise millénaire. Cela se traduit dans les références mobilisées par le régime : les Entretiens de Confucius ont supplanté le Petit livre rougeet Xi Jinping convoque volontiers des écoles de pensée des IVe et IIIe siècles avant notre ère, comme le taoïsme et le légisme.

Pour asseoir le pouvoir du Parti communiste, son secrétaire général promeut un « rêve chinois » qui, contrairement au rêve américain, repose sur plus de 2000 ans d’histoire. Il réconcilie ainsi ce que vous appelez le roman national maoïste avec l’histoire impériale de la Chine. Cette lecture de l’histoire est strictement encadrée contre les tenants de ce que Xi Jinping appelle le « nihilisme historique ».

Ce récit qui insiste sur le particularisme chinois permet aussi à Xi Jinping de marquer l’opposition de la Chine à l’Occident : il répudie la « démocratie constitutionnelle occidentale », les « valeurs universelles », la « société civile », le « néolibéralisme » ou encore le « journalisme à l’occidentale » et parle désormais de « solution chinoise » face aux défis de la globalisation et aux défauts du système démocratique.

Votre livre, paru en 2017, se concluait par une interrogation sur l’émergence d’un éventuel « Xi-isme », soit une pensée propre de Xi Jinping qui donnerait une nouvelle orientation au régime. Depuis, Xi Jinping, comme tous ses prédécesseurs, a inscrit sa pensée « sur le socialisme à la chinoise de la nouvelle ère » dans la charte du Parti. Pour introduire notre conversation je voudrais donc vous demander, François Bougon, quelle réponse vous apporteriez aujourd’hui à cette question de l’émergence d’une pensée propre de Xi Jinping.

Chaque semaine, Philippe Meyer anime une conversation d’analyse politique, argumentée et courtoise, sur des thèmes nationaux et internationaux liés à l’actualité. Pour en savoir plus : www.lenouvelespritpublic.fr