C’est le dossier le plus urgent de cette rentrée. Depuis son arrivée à la tête du gouvernement, Michel Barnier se penche sur l’épineuse question du budget 2025, avec une dette publique record puisqu’elle a atteint 110,6 % du produit intérieur brut (PIB). Elle a particulièrement augmenté : elle ne représentait que 66 % du PIB en 2007. Alors que les hausses d’impôts semblent être sérieusement envisagées par le nouveau Premier ministre, le camp présidentiel s’oppose à une telle décision. C’est pourtant ce que recommande le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, interviewé le 25 septembre 2024 dans les 4V. Pour réduire la dette de la France, il faut « combiner réduction des dépenses et certaines mesures fiscales », certifie-t-il. Le ministre de l’Économie, Antoine Armand, a parlé du pire déficit de son histoire. Un diagnostic qui n’est pas contestable selon François Villeroy de Galhau qui affirme : « Nous accumulons depuis trop longtemps trop de déficit et donc trop de dettes. Cette situation ne peut plus durer ». Le gouverneur de la Banque de France pense aux générations futures qui partent désormais avec un poids lourd à porter. La charge de la dette s’élève actuellement autour de 50 milliards et « ça va continuer à monter », indique-t-il. « Des dépenses du passé nous empêchent de faire des dépenses d’avenir comme l’éducation », regrette l’ancien directeur général délégué de BNP Paribas.
Le haut fonctionnaire explique que les prêteurs internationaux demandent à la France de réagir face à ce déficit record. En effet, la dette coûte de plus en plus cher, « plus que nous devons dépenser pour la défense nationale” informe François Villeroy de Galhau. Au début du mois de juin, avant les élections, l’écart de taux d’intérêt (le Spread) avec l’Allemagne était d’environ 0,50%. Maintenant, il s’élève à 0,80%. « Il faut vraiment soigner cette maladie », martèle le gouverneur de la Banque de France. Celui-ci préconise donc une hausse « d’impôts ciblés, justes » pour les hauts revenus et les grandes entreprises, ainsi qu’une réduction significative des dépenses publiques. Cela semble avoir été entendu par Michel Barnier, qui a évoqué la même idée. Concernant les dépenses, le haut fonctionnaire constate un manque d’efficacité. « Nous avons - à peu près - le même modèle social que nos voisins européens, les mêmes services publics, et je crois beaucoup à ce modèle social. Le problème, c’est que ça nous coûte beaucoup plus cher, nous sommes moins efficaces », analyse-t-il. Il serait possible d’économiser 300 milliards en observant ce qui marche le mieux chez nos voisins.
Une réduction des dépenses ne devrait pas rompre la croissance
Pour le gouverneur de la Banque de France, pas d’inquiétude à avoir à propos de la croissance qui pourrait être cassée par la réduction des dépenses. « Ça fait 40 ans qu’on dit que ce n'est pas le moment et qu’il ne faut pas casser la croissance. Résultat : on se retrouve avec cette dette publique, qui dérape et qui est à plus de 110% du PIB, qui lui est très supérieur à la moyenne européenne », explique François Villeroy de Galhau. Sur le plan de la croissance, le moment est favorable pour le haut fonctionnaire : « Parce que nous prévoyons à la Banque de France une reprise modérée, facilitée par la baisse de l’inflation ». L’objectif officiel : baisser le déficit public sous le seuil de 3% de produit intérieur brut à l'horizon 2027. « Ce n’est pas réaliste », affirme François Villeroy de Galhau, qui prône plutôt de viser 2030.