Mardi 30 janvier, Gabriel Attal prononçait son premier discours en tant que Premier ministre devant l’Assemblée Nationale. Un discours de politique large évoquant tour à tour les questions de l’économie, de la santé, du social, de l’écologie… Au milieu des nombreuses annonces, un secteur ressort comme particulièrement en ligne de mire du jeune bras droit de l’Élysée : l’économie. Ce dernier a affiché très clairement sa volonté de « favoriser le travail », dans le but de faire de la France « le pays le plus attractif d’Europe pour les investisseurs étrangers ». Réduction des charges pour les foyers moyens, suppression de l’ASS et réforme du RSA, « désmicardisation » du pays pour augmenter le pouvoir d’achat… À l’heure où les agriculteurs et agricultrices continuent de bloquer les routes pour dénoncer leurs conditions de travail, peut-on envisager une amélioration de ces conditions, ainsi que de celles de tous les actifs ?
Patrick Martin, président du Medef, affirme partager « beaucoup des préoccupations des agriculteurs sur la ‘surréglementation’ et sur une stratégie de décroissance avancée par certains décideurs européens ». Pour le syndicat patronal, les manifestations agricoles sont un révélateur des tensions dans l’industrie agroalimentaire qui perturbent le fonctionnement de beaucoup d’entreprises. Le choix du Premier ministre de faire de l’économie une priorité dans son gouvernement doit faire des heureux parmi les adhérents de la plus connue des organisations patronales. Patrick Martin de s'accorder sur le bilan de l'état de l'économie française fait par Gabriel Attal. Fataliste, il annonce que « le plus dur n’est pas passé », et que nous risquons « un deuxième semestre encore difficile ». Une conjoncture qu’il résume comme n’étant « pas fameuse ». La faute aux taux d’intérêts qui augmentent, entraînant moins d’investissements dans le logement, ce qui ferait ruisseler le problème sur tout le secteur du BTP, des promoteurs immobiliers et de l’hôtellerie ?
Solutionner le problème, aller de l’avant
Pour l’entrepreneur, la solution est toute trouvée : soulager les entreprises du poids des charges sociales. Selon lui, « la France est redevenue le pays le plus taxé au monde ». Un coût social des employés qui revient cher aux entreprises, comme l’explique Patrick Martin : « à un certain niveau, toute augmentation de salaire coûte trois fois plus cher à l’entreprise que ce que touche le salarié ». Un autre de ses soucis concerne les frais indexés aux patrons à cause de la « surréglementation » à l’échelle française et européenne. En accord avec les mesures de simplification proposées par le Premier ministre au sujet des révoltes agricoles, le chef de file du Medef estime qu’elles devraient aussi s’imposer à l’économie dans sa globalité. Citant l’OCDE qui chiffre que les normes de réglementations coûteraient 3 à 4 points du PIB au pays, c’est-à-dire environ 90 milliards d’euros, ce serait autant d’argent économisé pour les patrons si les règles tendaient à se simplifier.
Quelles règles ? Quelles simplifications ? Patrick Martin reste flou sur les changements exacts qu’il a en tête, l’important pour lui étant de favoriser les intérêts des patrons, ce qui n’aurait selon lui pas de grandes conséquences sociales. Les 120 métiers payés en-dessous du Smic évoqués par la ministre du travail Catherine Vautrin ? Une inexactitude et une exagération, selon le président du Medef. Le risque d’une augmentation du chômage ? S’il l’estime réel, il tempère sa gravité et considère qu’il faut que celui-ci reste « temporaire et limité ». Un discours propre au chef d’un syndicat patronal : déconnecté des conditions de travail des plus modestes, ou bien plus pragmatique et connaisseur ?
Face à Thomas Sotto, Patrick Martin se défend d’être un « ultra-libéral » accro à une croissance économique qui se ferait au mépris de toute règle. Il précise : « les ménages, comme les entreprises, souhaitent qu’on ait des normes pertinentes et compréhensibles », ce qu’il considère être le « véritable enjeu ». Il est favorable au libre échange, à l’accroissement des échanges internationaux, et se tourne vers l’Amérique du Sud et vers la construction d’une Europe plus solide économiquement pour faire barrage à des Etats-Unis et une Chine de plus en plus agressifs sur le plan économique.