Il y a tout juste trois semaines, l’affaire Nahel a déclenché une série d’émeutes sur tout le territoire. Des manifestations sauvages d’une rare violence en réaction à la mort tragique de cet adolescent de 17 ans, tué par un policier après avoir refusé d’obtempérer lors d’un contrôle routier. Parmi les villes qui ont été particulièrement touchées par ces événements, la commune de Grigny retrouve petit à petit son calme. « Le service public est mobilisé pour cette période de vacances » rassure Philippe Rio. À l’aube de la fête nationale du 14 juillet, les pouvoirs publics craignaient des débordements justifiant ainsi le déploiement des forces de l’ordre dans ces quartiers sensibles. Mais contre toute attente, aucun incident n'a été déclaré. L’appel à l’apaisement du président de la République qui a notamment demandé aux parents de mineurs d’être plus vigilants aurait signé la trêve ? Pour le maire du PCF de Grigny, « tout le monde a joué un rôle » dans cette sortie de crise. Services publics, dirigeants associatifs, citoyens, forces de l’ordre... Tous auraient contribué selon lui à stabiliser la situation. Pourtant, Emmanuel Macron a été fortement critiqué lorsqu’il a maladroitement renvoyé la responsabilité aux familles dans cette affaire. Lors des émeutes, Philippe Rio avait alerté à juste titre le gouvernement sur les manquements et les difficultés rencontrés dans les banlieues allant même jusqu’à les qualifier de « poudrières ». Cet apaisement est-il durable ? « Nous étions quelques maires de ces villes populaires à saisir le président de la République avec un cri d’alerte sur une situation qui était extrêmement difficile. Régulièrement, nous alertons sur la pauvreté, l’inflation, sur un mouvement associatif à bout de souffle, sur des enseignants fatigués, éreintés » explique notre invité qui nous partage son expérience sur le terrain. Pour Philippe Rio, la doctrine policière doit être interrogée afin d’apaiser les relations entre les jeunes et les forces de l’ordre. Cela passe par « une IGPN indépendante » et une révision de la loi de 2017 qui autorise les policiers à utiliser leur arme en cas de légitime défense. Depuis la mort de Nahel, la NUPES pointe du doigt cette règle établie par Bernard Cazeneuve qui, selon elle, donne le « permis de tuer ». Pour atténuer cette haine anti-flics, Philippe Rio s’inspire des politiques étrangères notamment du modèle allemand et anglais dont la question des contrôles est très objectivée. Élu « meilleur maire du monde » par la City Mayors Foundation pour son action pour la pauvreté, il appelle à la « réconciliation nationale » qui pourrait passer par un nouvel appel de Grigny. En 2017, 1000 maires de tous bords confondus s’étaient réunis dans cette ville symbolique qui concentre inégalités et pauvreté. Pour encadrer et pallier les carences de sa commune, Philippe Rio avait demandé plus de crédits, plus de police et plus de justice. Six ans après cette initiative, le gouvernement y a-t-il répondu favorablement ? « Il faut encore faire avec générosité et sincérité […] nous travaillons pour avoir un nouvel appel à la rentrée. Nous sommes à disposition pour réconcilier ce pays et apporter des solutions concrètes de terrain pour la France des quartiers populaires mais aussi la France des villes rurales » explique-t-il.
Sport dans les quartiers : un remède aux tensions ?
Parmi les propositions soumises par notre invité, le sport doit être encouragé. À un an des Jeux Olympiques, il souhaite accélérer cette politique socio-sportive afin d’engager et de responsabiliser davantage la jeunesse. « C’est un facteur de réconciliation. C’est du soft power. Créons des emplois, retrouvons des stages, faisons de l’apprentissage de manière massive. Il y a une forte demande et une appétence des jeunes des quartiers et pas que des quartiers » martèle notre invité. La semaine dernière la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra a rassemblé les élus à l’INSEP pour trouver des solutions. Un événement fédérateur qui a réuni 300 acteurs et les fédérations sportives qui ont une délégation de service public. « C’est un investissement d’avenir. Les emplois dans le sport sont des emplois qui deviennent durables à la sortie des contrats aidés » soutient le maire de Grigny. Et d’ajouter qu’il faut renforcer la politique de la ville et de la rénovation urbaine : « C’est 600 millions d’euros, moins de 1% du budget de l’État » souligne-t-il.