Jeudi 9 mars 2023, la Cour des comptes a remis son rapport annuel au président de la République et a sonné l'alarme. Le constat est sévère, la dette publique atteindrait 111% du PIB en 2023, ce qui nous placerait parmi les pays les plus endettés de la zone euro. « Le régime des retraites n’est pas équilibré pendant une dizaine d’années, il coûte plus cher en France que chez nos partenaires européens. Le déficit devra être payé par nos enfants et petits enfants si on ne fait rien », a annoncé Pierre Moscovici, premier président de la Cour des comptes, invité sur le plateau des 4 vérités ce vendredi 10 mars 2023. L’ancien ministre de l’Economie a affirmé au micro de Jeff Wittenberg qu’une réforme était nécessaire, sans préciser de quel type.
En octobre 2021, un rapport de la Cour des comptes préconisait un recul de l’âge de départ à la retraite, une baisse relative du niveau des pensions ou une hausse des cotisations, afin de combler le déficit. L’ancien ministre a affirmé cependant que l'institution insistait déjà à l’époque sur une nécessaire concertation et sur la négociation. En effet, deux tiers de l’opinion est opposée à la réforme et les manifestations rassemblent dans toute la France des centaines de milliers de personnes depuis plusieurs semaines. « Nous étions conscient de la complexité sociale de la question et du besoin de prendre en compte notamment la pénibilité au travail ou les carrières hachées », affirme Pierre Moscovici. Ce dernier a cependant insisté sur son devoir d’impartialité totale et son indépendance, et que c’est à la démocratie, politique et sociale, de jouer son rôle.
Un déficit qui ne peut perdurer
La Cour des comptes est préoccupée par la situation actuelle car « nous avons un taux de dépenses publiques dans le PIB qui est le plus élevé d’Europe, 58%. Nous n’avons pas pour autant une qualité de services publics perçue par nos concitoyens, qui est toujours formidable, il y a des interrogations, sur l’état du système éducatif, sur la politique du logement, sur la politique de santé », explique son premier président. Les déficits atteignent 5% du PIB en 2022 et en 2023, la France connaît une situation de dégradation qui ne faiblit pas, comparée à ses partenaires de la zone euro.
La dette publique est incompatible avec le financement d’investissements pour l’avenir, « or nous avons besoin d’investissements, pour la transformation écologique, pour la recherche, l’innovation. Si l’on veut investir, et je crois qu’il le faut, il faut se désendetter et pour se désendetter il faut maîtriser les dépenses publiques », a annoncé Pierre Moscovici.
Quant à la question de l’inflation, le gouvernement assurait une meilleure gestion de l’inflation comparée à nos voisins, avec une politique favorable aux ménages, grâce aux chèques alimentaires ou encore aux chèques pour le carburant. Mais le « quoi qu’il en coûte » coûte-t-il trop cher ? « Franchement, oui » d’après l’ancien ministre de l’Economie. Le rapport précédent de la plus ancienne institution de l'Etat avait affirmé que ces dépenses étaient nécessaires pour la crise Covid, mais « nous sommes sortis de cette crise ». Aujourd’hui nous faisons face à une nouvelle crise, celle de l’énergie, avec 25 milliards de dépenses en 2022 et 37 milliards en 2023. L’ancien membre du parti socialiste affirme que « Nous vivons au-dessus de nos moyens. Il faut des mesures ciblées et temporaires sur l’énergie. Il va falloir sortir du quoi qu’il en coûte, nous n’avons pas les moyens d’un « quoi qu’il en coûte» permanent et général et qui dure pour l’éternité ». Le président de la Cour des comptes explique la nécessité d’analyser la qualité des dépenses publiques pour réformer nos politiques publiques et que celles-ci soient davantage performantes, justes, efficaces et moins coûteuses.