Une triple rentrée pour Sophie Binet. Lundi 4 septembre 2023 marque le début d’une année scolaire mouvementée pour la Secrétaire générale de la CGT. La leader syndicale, ancienne CPE (conseille principale d’éducation) dans un lycée professionnel au Blanc-Mesnil en région parisienne et dans les quartiers nords de Marseille est maman d’un petit garçon de 4 ans.
« J’ai pensé très fort aux millions de familles, d’élèves et d’enseignants pour cette rentrée. En cette période, nous avons toujours la boule au ventre. En tant que CPE, je l’avais aussi cette boule au ventre, car il se passe beaucoup de choses. J’ai aussi pensé à cette rentrée qui n’est pas facile pour de nombreuses familles qui n’ont pas les moyens de boucler leur fin de mois car la rentrée coûte chère et c’est une vraie problématique. Le deuxième point important, c’est qu’il manque beaucoup d’enseignants et d’enseignantes. Il y a 33 000 postes vacants, il y a donc beaucoup d’élèves qui seront sans enseignant devant eux, au moins sans enseignant titulaire, donc il y a une vraie inquiétude sur la capacité à avoir des enseignants devant tous les élèves » a soulevé notre invitée.
L’éducation nationale peine à séduire les candidats. Le gouvernement a promis une revalorisation salariale de 125 à 250 euros net. Une promesse insatisfaisante pour la leader CGT. « Il faut vraiment revaloriser le métier d’enseignant et ce n’est pas le pacte qui va changer cela. Les 125 à 250 euros net par mois en plus sont accompagnés de nouvelles tâches, alors que les enseignants ont déjà un temps de travail très élevé contrairement à toutes les caricatures qui sont entretenues. Les chiffres montrent que les enseignants ne travaillent pas loin de 45h par semaine, c’est un des temps de travail les plus élevés en Europe. La CGT propose de rétablir les pré-recrutements, c’est-à-dire des dispositifs après le bac ou bac+2 avec un salaire en échange d’un engagement à travailler pour l’éducation nationale un nombre d’années donnés ».
La question de l’abaya continue de diviser la classe politique. Le ministre de l’Éducation, Gabriel Attal, a annoncé au journal de 20h de TF1 le dimanche 27 août 2023, l’interdiction du port de l’abaya dans les établissements scolaires.
« J’ai interpelé le président de la République sur cette question-là, car je pense qu’il est très dangereux de faire la rentrée scolaire sur cette annonce-là pour deux raisons : dans un premier temps, cela occulte les vraies questions sur l’éducation nationale [postes vacants, charge de travail, salaire ndlr] » déclare Sophie Binet et d’ajouter : « je pense que cela stigmatise une partie de la population, toujours la même au hasard, alors que la question concerne au plus élevé, selon les chiffres de l’éducation nationale, 150 établissements sur les 55 000 ».
Emmanuel Macron / Sophie Binet : un tête-à-tête à l’Élysée
Mardi 29 août 2023, la leader CGT a rencontré le président de la République pour lui transmettre plusieurs messages et attirer son attention sur des dossiers spécifiques comme l’utilisation du 49:3 sur la réforme des retraites ou encore la montée de l’extrême-droite en France. « J’ai voulu l’alerter sur la grande défiance que les Français ont avec le passage en force de la réforme des retraites qui s’applique depuis le 1er septembre dans des conditions catastrophiques. Je l’ai également averti sur le niveau inédit de l’extrême droite en lui disant qu’il serait responsable devant l’Histoire, s’il était le président de la République qui avait été le marchepied à l’extrême droite, ça ne serait pas un héritage très facile à porter et je l’ai alerté sur la question environnementale en lui disant que nous constations les températures les plus chaudes jamais enregistrées sur la surface de la planète et qu’il n’est pas possible de foncer à grande vitesse dans le mur, qu’il fallait prendre des mesures immédiates. Il m’a écouté poliment mais il continue de penser qu’il peut avoir raison, seul contre tous ».
Mardi 29 août 2023, Marylise Léon, secrétaire générale de la CFDT depuis le 21 juin 2023 a déclaré qu’elle n’a pas ‘de revanche à prendre sur le gouvernement’. Sophie Binet termine en affirmant que la CGT n’a pas non plus de revanche à prendre. « J’ai dit à Emmanuel Macron que, pour tourner la page de cette séquence catastrophique sur la réforme des retraites, il fallait organiser un référendum et il a dit non, ce qui montre qu’il n’a toujours rien compris ».