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George Miller et Francis Ford Coppola sont de retour sur la croisette, pour de spectaculaires recarossages de leurs cinémas. 

Double programme maousse ce jeudi à Cannes. À commencer par Furiosa, à la fois spin-off et prequel de Mad Max Fury Road, se passant dans le même univers mais consacré à son personnage féminin et, plus encore, virage à 180°. Quand Fury Road réjouissait à vouloir revenir à un cinéma purement physique et incarné, dégraissé jusqu'à l'os pour se concentrer sur l'action, Furiosa se nourrit de chapitres et de variations de rythme pour transformer une gamine rebelle en gladiatrice vengeresse.  George Miller assumant pleinement vouloir faire un péplum de fer et de feu, mais surtout s'écarter de la route des blockbusters contemporains sans âme. Furiosa tient moins de l'exceptionnel morceau de bravoure pyrotechnique qu'était Fury Road, mais il renoue avec la puissance d'une grammaire de cinéma à l'ancienne. Plus que l'adrénaline de courses-poursuites dantesques, c'est l'efficacité des plans et d'un montage allant à l'essentiel, ravivant avec une science originelle qui fait vrombir de jubilation. Furiosa s'achève sur un dialogue entre son héroïne et sa Némésis, formidable méchant, qui s'interroge sur ce qu'il restera d'eux et s'ils portent la capacité de devenir des mythes. 

Quant à la projection de Megalopolis, le très attendu film de Francis Ford Coppola, il a de quoi entrer dans la légende cannoise, tant cela restera un moment de sidération totale. À vrai dire on ne sait pas trop ce qu'on a vu, tant Megalopolis alterne fulgurances visuelles et propos méandreux, séquences révolutionnaires et autres dont la direction artistique semble avoir été abandonnée à une IA façon Midjourney. Un film autant en roue libre qu'ultra-personnel jusqu'à être un concentré de Coppola :  enjeux de pouvoir et de clans familiaux en écho du Parrain,  chaos à la Apocalypse Now, héros idéaliste à la Tucker et profusion sensorielle de son Dracula, toutes les facettes sont là. Reste à comprendre de quoi parle Megalopolis, entre allégorie d'une Amérique en redite de la chute de l'empire romain, éloge du sentiment amoureux qui pourrait réenchanter un utopiste et citations de Shakespeare ou de Marc Aurèle dans le texte. Tout cela érige une tour de Babel aussi fascinante qu'agaçante, quand on ne sait plus s'il faut applaudir la noblesse d'un geste fou de cinéma autofinancé ou s'attrister de devoir assister à une autodestruction doublée d'un évident suicide commercial. Comme une flamboyante chute de l'empire Coppola en quasi-direct.

Pendant le Festival de Cannes, retrouvez tous les jours la chronique Pop Corn d’Alex Masson, notre envoyé à la croisette, à 7h37 dans « T’as vu l’heure ? », la matinale de Radio Nova.