C’était en 2010. Une peinture flamande a été vendue aux enchères en Autriche pour 7 millions d’euros, un record pour le pays.
Pourtant, cette année, le record vient d’être pul-vé-ri-sé (et le mot est faible). Un tableau de Gustav Klimt, intitulé « Portrait de Mademoiselle Lieser », qui a été mis aux enchères hier à Vienne, a été adjugé 30 millions d’euros.
Son prix exorbitant n’est pas la seule particularité de ce tableau.
Ce tableau de Gustav Klimt représente une jeune femme brune aux traits précis, ornée d'une grande cape richement décorée de fleurs sur un fond rouge vif. Il est inachevé, non signé et peint en 1917, un an avant la mort de l’artiste. Mais celui-ci présente d’autres particularités :
On ne connaît pas le modèle du peintre, et ce tableau, très bien conservé, n’aurait jamais quitté l’Autriche, le pays natal de Klimt. Il a pourtant été porté disparu durant 100 ans avant de refaire mystérieusement surface.
Le modèle du peintre, une jeune femme visiblement issue de la haute bourgeoisie, n’est pas connu, mais on a quand même une petite idée de qui ça pourrait être. Bien qu’un premier catalogue complet des œuvres de Klimt, réalisé dans les années 60, évoque un certain Adolph, on pense plutôt à Lilly Lieser, une pionnière dans l’émancipation des femmes.
La famille Lieser descendait d’une grande dynastie industrielle juive, mécène de l’avant-garde artistique. Une hypothèse est que Lilly aurait confié ce tableau à un membre de son personnel avant de mourir en déportation fin 1943. L’œuvre serait réapparue ensuite chez un commerçant nazi avant que sa fille, puis des parents éloignés en héritent à leur tour.
Cependant, pour la maison Kinsky, spécialisée dans les procédures de restitution, c'est une « hypothèse parmi d'autres »car après la guerre, la toile n'a jamais été réclamée par l'une des trois descendantes des Lieser qui avaient toutes survécu, contrairement à d'autres biens.
La suite est un mystère puisque les propriétaires de l'œuvre, qui se sont fait connaître il y a seulement deux ans, ont souhaité garder l’anonymat jusqu’à la vente aux enchères.
En bref, beaucoup de questions sans réponse autour de ce « Portrait de Mademoiselle Lieser » mais comme le disait le poète latin Publius Syrus, « toute question ne mérite pas de réponse ».
Photo : Le « Portrait de Mademoiselle Lieser » lors d’une conférence de presse à Vienne, 25 janvier 2024. Roland SCHLAGER, AFP