Le Vrai Monde

Pierre Gaffié

Prenez le mot "I M A G E", changez l'ordre des lettres et vous aurez le mot "M A G I E". Ça tombe bien non ? Car c'est le destin de toute image : provoquer une magie, dont le spectateur fera son miel. Faire un film, c'est un grand cache-cache. Parce que les artistes adorent dissimuler ce qu'ils veulent que nous trouvions tous seuls ! Dans "Le vrai monde", la nouvelle émission de Pierre Gaffié, nous recevrons des personnalités dont les vies ont accouché d'images, pas forcément magiques, mais toujours prolifiques. Nous parlerons cinéma, mais pas que. Nous parlerons de l'actualité, mais pas que. Nos invités seront cinéastes, acteurs, mais pas que... Car une image ce n'est jamais QU'une image. Dans la vie, nous nous faisons tous des films, certains finissent sur le grand écran, d'autres restent dans nos cœurs. Mais tous méritent qu'on y prête attention. C'est ça le vrai monde. Pendant une heure, nous ferons la passerelle entre la vie et l'écran, l'infiniment petit et l'infiniment grand... Des entretiens, des chroniques, des arrêts sur images, des arrêts sur passé.

Sophie Barthes est l'un des regards les plus singuliers du cinéma contemporain. Et son sujet de prédilection, c'est l'âme. Elle n'est pas la seule, me direz-vous, à aborder ce sujet. Sauf que chez elle, l'âme d'un être humain, aussi bien que celle de la société, voire d'une entreprise, sont devenues des objets de transaction, voire de négociation. Dans"Âmes en stock" son premier long-métrage, un acteur New Yorkais, aux prises avec des répétitions difficiles de "Oncle Vania", décidait de liquider son âme et en acheter, littéralement, une neuve (Russe...). Dans "Madame Bovary", la pauvre Emma se donnait corps et âmes à ses amants, bien que ses derniers ne prenaient que son corps. Elle en mourut. Dans "The pod génération", en salles depuis le 25 octobre, il est question de l'âme d'un foetus, d'un futur bébé et bien sûr, à l'heure de l'intelligence artificielle, de notre futur à tous ! Quand Rachel et Alvy, la trentaine, décident d'avoir un enfant, une société New Yorkaise ayant pignon sur rue parviennent à mes convertir à une grossesse extra-utérine, une naissance dans un "pod" (une coquille...) que des femmes arborent déjà dans le métro. Un comble quand on sait que Alvy est botaniste et ne jure que par le vrai, le naturel. Mais, même lui, après une discussion chez une psy (virtuelle) accepte de troquer le projet d'un bébé "à l'ancienne" contre celui dicté par la mode et donc, extra-uterin. Car la mode est un monde. Parallèle... La mise en scène de Sophie Barthes (et l'image de son compagnon dans la vie : Andrij Parekh) nous glisse comme dans un cauchemar éveillé mais avec la certitude qu'une résistance aux multinationales est possible. Car leurs forces n'existent que par nos faiblesses... Les amateurs de la série "Games of thrones" auront le frisson de retrouver la comédienne Emilia Clarke dans le rôle de Rachel. En fin d'émission, une étudiante en audiovisuel, Léa Nicolino, autrice d'un mémoire sur les nouvelles grossesses au cinéma (telle celle du film "Titane"...) donne son point de vue sur le film... Bande-annonce de "The pod génération" https://youtu.be/wKq3x-ZyvOo?feature=shared
Jean Rochefort n’était pas qu’un « dandy », tantôt à son avantage, tantôt dérisoire (« Un éléphant, ça trompe énormément »). Enfant de la post-nouvelle vague (où il ne fut pas invité) il eut une carrière sur deux jambes : le théâtre (PInter notamment), et le cinéma (une soixantaine de rôles). Pacifiste convaincu, il se retrouve associé au travail d’un ex-militaire (Schoendorfer et le « Crabe-tambour ») Homme penchant à droite (« inactif et qui préfère le regret à l’action »), il fit deux films avec son opposé politique : Bertrand Tavernier. Jean Rochefort savait être cassant avec ses réalisateurs (Chabrol traité de paresseux, Leconte à qui il demande de ne plus adresser le parole sur le tournage des « Vécus étaient fermés de l’intérieur). Il savait aussi être encourageant avec de jeunes auteurs qu’il cautionnait par sa présence (Salvadori, Lioret entre autres). Rochefort était plus complexe que Marielle et Noiret, ses deux comparses des « Grands ducs » (Leconte). Le cinéaste Pierre Granier-Deferre raconte qu’il eu le vertige en visitant la maison de Rochefort tellement celle-ci était vide et spartiate, Rochefort mettant ses souvenirs dans les placards. Jean Rochefort avait un psy, à qui il dit qu’il n’avait pas envie d’aller voir Noiret sur son lit de souffrance. Sauf que Le psy a insisté... Pas impliqué dans Mai 68, énervé par le culte de la vedette, c’était un libre-penseur indépendant qui « devenait plus misanthrope en vieiilissant . « Je suis victime de mon époque » dit-il dans le livre de Jean-Philippe Guerrand. Pourtant l’époque l’a aimé. Jusqu’au bout et jusque à ce film en noir et blanc (« L’artiste et son modèle » de Fernado Trueba), où il est un peintre dont les sens et l’âme chavire au contact d’une de ses jeunes modèles... Le cheval fut sa passion, qui l’aidait à prendre ses distances avec les mondes creux du show-biz. Il participa au développent d’une technique in vitro responsable, qui permit de ne pas s’en remettre, question équidés, à la rentabilité américaine. « Prince sans rire », la somme de Jean-Philippe Guerrand sur Rochefort est à la fois chronologique mais aussi en escalier. Une biographie fidèle, tissée d’histoires et de souvenirs, et qui mérite un vrai détour. A l’image de cet « Etrange voyage » de Cavaiier, où Rochefort arrête le temps et sort des rails pour un détour avec sa fille. (Pierre Gaffié)
Alexandre Moix est l’invité du « Vrai Monde » de Pierre Gaffié. Après sa projection au festival de Cannes et avant sa diffusion sur France 5 en Octobre, le documentaire « Patrick Dewaere, mon héros », documentaire de Alexandre Moix, est le fil rouge du « Vrai Monde » de Septembre. Il y a 40 ans, Patrick Dewaere disparaissait, et sa mort nous laissait orphelins. On connaît le proverbe « En Afrique, quand un vieux meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ! », on pourrait en dire autant des grands acteurs : quand ils s’en vont, ils emportent avec eux les rôles qu’ils auraient pu jouer et que d’autres incarneront peut-être pas moins bien, mais différemment. Patrick Dewaere, à l’enfance brisée, a su, pu, voulu, puiser au fond de ses drames personnels le carburant nécessaire pour des films aussi complexes que « Série Noire », « La meilleure façon de marcher » ou « Paradis pour tous », et sans doute aussi « Les valseuses » avec sa noirceur cachée derrière le rire de façade. Dans le documentaire de Alexandre Moix, c’est Lola Dewaere, la fille de l’acteur, aujourd’hui comédienne qui reconstitue le puzzle de la vie d’un homme à qui elle a pu dire enfin « Papa » lors du tournage de ce très beau film. Dans la deuxième partie de l’émission, deux comédiennes (Anne-Laure Morin et Thanäis Vienne) donnent leurs regards sur le film et sur Patrick Dewaere. L'émission a un sommaire foisonnant puisqu'elle comprend aussi : -Un entretien du cinéaste Laurent Larivière par Justine Vallette, étudiante en art, à propos du film "A propos de Joan" -Un retour sur le festival du film de Lacoste (Vaucluse), avec un entretien croisé de trois membres du jury court-métrage : Bruno Slagmulder, Stéphanie Crayencour et Victor Meutelet.
27/11/2021
La comédienne et réalisatrice Aïssa Maïga est ce 27 Novembre 2021 l’invitée du «Vrai Monde» de Pierre Gaffié. Sa carrière d’actrice, prolifique, aventurière, s’est toujours doublée d’un regard sur le monde, le monde intérieur (ses films pour Abderahhamane Sissako ou Alain Gomis) ou le monde extérieur, à l’image du livre qu’elle a impulsé et co-signé sur les discriminations que subissent des artistes pour leur couleur de peau («Noire n’est pas notre métier», éditions «Points»). A Cannes, Aïssa Maïga a créé l’évènement avec son documentaire «Marcher sur l’eau», portrait d’un monde privé d’eau (ici le Niger) et de ce fait des droits élémentaires à l’éducation ou la justice. Dans «Le vrai monde», nous consacrerons la première partie de l’émission à ce film singulier et pluriel (par sa multiplicité de points de vues), documentaire sans voix-off, qui donne à réfléchir, et à agir, loin des films à thèse pollués par un regard du genre «Je sais tout, écoutez moi !». Aïssa a fait un film à son image, humble mais direct, fait un film qui claque (les larmes ne sont jamais loin), sans faire craquer. Ces hommes et ces femmes du village de Tatiste se battent, pour eux et pour nous aussi. Dans la deuxième partie, Pierre Gaffié a demandé à l’artiste de parler de son panthéon personnel, en l’occurrence 3 films (de Truffaut, Haneke et Sissako) et de Mishima, dont Aïssa Maïga lira quelques lignes tirées du «Tumulte des flots». L’émission démarre par le rendez-vous à présent rituel de l’analyse des yeux de l’invitée, faite par Anne Rioux, spécialiste du meta-langage…